Séance 4. La lampe merveilleuse

Quand il se vit enterré tout vif, le jeune garçon appela mille fois son oncle en criant qu’il allait lui donner la lampe; mais ce fut en vain. Il s’assit sur les marches, dans le noir, et se mit à pleurer. Il demeura ainsi deux jours, sans manger ni boire. Le troisième jour, sentant sa mort proche, il joignit les mains et appela Dieu. Mais en faisant ce geste, il fit tourner sans y penser l’anneau que le magicien lui avait mis au doigt. Aussitôt apparut un énorme génie au regard épouvantable. Il s’inclina devant Aladin :

– Je suis le génie de l’anneau ! Que veux-tu ? Je suis prêt à t’obéir comme ton esclave.

Aladin répondit sans hésiter :

– Oh ! Qui que tu sois, fais-moi sortir de ce lieu si tu en as le pouvoir.

À peine eut-il prononcé ces paroles que la terre s’ouvrit et qu’il se trouva hors de la caverne, à l’endroit même où le magicien l’avait amené.

Aladin réussit à rentrer chez lui avec bien de la peine. Il embrassa sa mère en pleurs et lui dit qu’il mourait de faim, mais elle n’avait pas d’argent et presque plus rien à manger. Il lui raconta son aventure, lui montra la petite lampe de cuivre ainsi que les boules de verre coloré qu’il avait ramassées dans le jardin et qui brillaient comme le soleil; mais sa mère, pas plus que lui, n’en connaissait la valeur…

Le lendemain, Aladin décida donc de vendre la lampe pour que sa mère puisse acheter des provisions. Celle-ci alla la chercher.

– La voilà, mais elle est bien sale, je vais la nettoyer.

À peine eut-elle commencé à frotter cette lampe avec de l’eau et un peu de sable fin, qu’aussitôt lui apparut un génie hideux et gigantesque :

– Je suis le génie de la lampe ! Que veux-tu ? Je suis prêt à t’obéir comme ton esclave.

La mère s’évanouit de terreur. Aladin se saisit alors de la lampe.

– J’ai faim, dit-il au génie, apporte-moi de quoi manger.

Le génie revint chargé d’un grand plateau d’argent qu’il portait sur sa tête, sur lequel étaient disposés douze plats emplis de nourriture délicieuse, six grands pains blancs comme neige, deux tasses d’argent et une grande carafe de jus d’orange. Il posa le tout sur le sofa et disparut aussitôt.

Lorsque sa mère revint à elle, elle demanda d’où venait cet excellent et abondant repas. Aladin lui expliqua que c’était l’œuvre d’un génie. Elle eut peur et pria son fils de se débarrasser de la lampe comme de l’anneau :

– Crois-moi, il ne faut pas avoir affaire aux génies, ce sont des démons.

Aladin promit à sa mère de faire bon usage des pouvoirs de l’anneau et de la lampe.

Sans titre
Illustration de Karl Simunek (1922)
« Histoire d’Aladin ou la lampe merveilleuse », dans Les Mille et Une Nuits, traduit de l’arabe par A. Galland et adapté par H. Potelet