Le Romain et l’Autre : les Carthaginois

À plusieurs reprises, les Romains se sont opposés aux Carthaginois lors de guerres appelées guerres puniques.

1ère partie : Une cité très convoitée

Carthage contre Rome

Selon la légende, la princesse phénicienne Elissa fonda, au IXème siècle avant J.-C., une cité qu’elle baptisa Nouvelle (Kart-Hadasht en phénicien) sur un territoire d’Afrique concédé par le roi berbère (le terme « berbère » désigne les premiers habitants d’Afrique) Hiarbas. Devenue la reine Didon, elle fit de sa ville le centre d’une civilisation raffinée.

Au fil du temps, les Carthaginois développèrent leur réseau commercial dans toute la Méditerranée occidentale et bâtirent ainsi un empire maritime qui finit par se heurter aux intérêts des Romains : avec une ambition et des forces égales, ces deux peuples visaient la domination du monde.

  1.  De quelle origine sont les Carthaginois ?
  2.  D’où vient le nom Carthage ?
  3.  Qui a fondé Carthage ?
  4.  Pourquoi Carthage devient-elle rapidement l’ennemie de Rome ?

Une situation géographique enviable

carthage

  1.  À quelle ville actuelle correspond Carthage ? À quel pays et à quel continent cette ville appartient-elle ?
  2. Quelle constatation peux-tu faire sur la répartition des possessions carthaginoises ?
  3. Pourquoi Rome peut-elle être tentée d’annexer Carthage ?

Les causes historiques des guerres puniques

En 264 avant J.-C., Rome souhaite étendre sa domination en Méditerranée…

Comme le peuple romain, vainqueur de l’Italie, était parvenu au détroit de Sicile, il s’arrêta un moment. C’est alors qu’il entrevit dans les parages une très riche proie détachée et même arrachée de son Italie. Il brûla pour elle d’un tel désir, que ne pouvant la relier par une digue ou des ponts, il choisit de se l’attacher par les armes et les combats et de la relier à son propre territoire par une guerre. L’occasion se présenta : une cité alliée de la Sicile, Messine, se plaignit de la tyrannie des Carthaginois. Ainsi que Rome, Carthage convoitait la Sicile; et, dans le même temps, toutes deux aspiraient, avec une ardeur et des forces égales, à la domination du monde. Rome prit donc les armes sous prétexte de secourir ses alliés, mais en réalité tentée par cette proie ; et, malgré la terreur qu’inspirait la nouveauté de l’entreprise, ce peuple grossier, et véritablement terrestre, montra qu’il est indifférent pour le courage de combattre à cheval ou sur des vaisseaux, sur terre ou sur mer.

  1.  Pourquoi les Romains veulent-ils conquérir Carthage ?
  2.  Quel prétexte Rome donne-t-elle ?
  3.  Quel type de guerre Rome devra-t-elle engager contre Carthage pour conquérir la Sicile ?

Recopie le bilan de la première partie

  • Le contrôle de la Sicile est la cause de la première guerre punique, déclenchée en 265 avant J.-C. Pour cette guerre, Rome construit sa première flotte armée et remporte la première victoire navale de son histoire.
  • Les Carthaginois, emmenés par le général punique Hamilcar Barca, font subir des défaites sérieuses aux Romains, qui finissent cependant par chasser leurs ennemis de Sicile et leur imposent de lourdes indemnités de guerre : lourde amende et abandon de la Sicile et de la Sardaigne par Carthage.

2ème partie : l’ennemi juré de Rome

Une haine de père en fils

Hannibal explique au roi Antiochus de Syrie, chez qui il s’est réfugié, pourquoi il lui est impossible de vivre en paix avec les Romains.

Je n’avais pas plus de neuf ans, j’étais encore un petit enfant, lorsque mon père Hamilcar, partant de Carthage pour l’Espagne en qualité de général en chef, immola des victimes aux dieux. Pendant le sacrifice, il me demanda si je voulais l’accompagner dans son expédition. Comme j’avais montré ma joie en entendant sa question, et que je m’étais mis à le prier de ne pas hésiter à m’emmener, il me déclara : « Je veux bien, mais à une condition : tu vas me faire la promesse que je vais te demander ». Aussitôt il me fit approcher de l’autel sur lequel il avait commencé le sacrifice, il fit écarter les assistants, puis me fit jurer, la main sur l’autel, que jamais je ne serais l’ami des Romains. Ce serment que je fis à mon père, je l’ai si bien tenu jusqu’à aujourd’hui que personne ne doit avoir de doute quant à la constance de mes dispositions à leur égard, jusqu’à la fin de mes jours.

Cornelius Nepos, Vie d’Hannibal

Pour quelle nouvelle raison (autre que celles qui étaient déjà la cause de la première guerre punique), Hannibal souhaite-t-il mener une guerre contre les Romains ?

hannibal
 Hannibal jurant une haine éternelle à Rome, Jacopo Amigoni
  1.  Décris les personnages : comment sont-ils vêtus ? Comment reconnaît-on Hannibal et son père ?
  2.  Quelles sont leurs attitudes ? Quelle phrase de Cornelius Nepos te permet de comprendre ce qu’ils sont en train de faire ?
  3.  Quel âge a Hannibal à cette époque ?
  4.  Où se situe la scène ? Décris le décor.
  5.  Quel objet symbolise Rome ? Comment l’as-tu reconnu ?

3ème partie : Un soldat redoutable

Portrait d’Hannibal

C’est lui qui montrait le plus d’audace pour affronter les dangers, lui qui montrait le plus de réflexion au milieu des dangers eux-mêmes. Aucune fatigue n’épuisait son corps ou ne pouvait vaincre son âme. Il supportait également la chaleur et le froid. S’agissait-il de veiller ou de dormir ? Il ne faisait pas de différence entre le jour et la nuit. Il était à la fois, et de loin, le meilleur des cavaliers et des fantassins. Il allait le premier au combat, il était le dernier, la lutte engagée, à se retirer.

À d’aussi grandes qualités répondaient, chez lui, un nombre égal de défauts, une cruauté inhumaine, une perfidie plus que punique (1), nul souci du vrai, du sacré, aucune crainte des dieux.

Tite-Live, Histoire romaine

(1) La perfidie punique renvoie à la légendaire mauvaise foi des Carthaginois, selon l’avis des Romains.

L’auteur met en balance la personnalité d’Hannibal. Quelles sont ses qualités et ses défauts ?

4ème partie : La traversée des Alpes et ses dangers

Au sommet des Alpes

Venu d’Afrique, Hannibal s’est fixé pour but d’envahir Rome, la cité qu’il hait depuis son enfance. Parti d’Espagne, il a déjà franchi les Pyrénées et le Rhône. Mais devant lui se dresse une barrière réputée infranchissable : les Alpes.

Les éléphants et les cavaliers étaient en tête de l’armée en marche ; Hannibal lui-même, à l’arrière avec l’élite de l’infanterie. Regardant tout autour de lui et attentif à toutes choses, il avançait. Sur les chemins étroits et escarpés, bordés par des précipices, les éléphants retardaient beaucoup la marche, mais ils assuraient la sécurité de la colonne contre les tribus gauloises ennemies qui n’osaient pas s’approcher de ces animaux qu’ils n’avaient jamais vus. Au neuvième jour de marche, on arriva au sommet des Alpes par des chemins le plus souvent impraticables. À travers la montagne couverte de neige, l’ordre de marche ayant été donné à la première lueur du jour, l’armée avançait avec lenteur ; tandis que la fatigue et le désespoir se manifestaient sur tous les visages. Après avoir devancé les enseignes pour se placer sur un promontoire dont la vue s’étendait au loin de tous les côtés, Hannibal encourage ses soldats. À partir de ce moment-là, l’armée se remit en marche.

Tite-Live, Ab Urbe condita
  1.  De quels éléments se compose l’armée d’Hannibal ?
  2. Pourquoi cette armée suscite-t-elle la stupeur ?
  3. Comment se comporte Hannibal pendant la marche ?
  4. Pourquoi l’armée se remet-elle en marche ?
  5. Selon toi, quels sont les différents avantages et inconvénients des éléphants dans l’armée d’Hannibal ?

Gros plan sur l’utilisation tactique des éléphants

hannibalLes éléphants pouvaient être employés à un grand nombre de tâches militaires. Ils pouvaient porter de lourdes charges et fournir un moyen de transport utile. Au cours des batailles, les éléphants de guerre étaient généralement déployés au centre de la ligne d’attaque où ils pouvaient être utiles pour stopper une charge ou commencer la leur. Une charge d’éléphant peut atteindre 30 km/h. Elle est donc difficile à arrêter avec seulement de l’infanterie. Sa puissance repose sur la force brute et sur la crainte qu’un animal de plusieurs tonnes (5 à 7.5 tonnes) peut inspirer dans les lignes ennemies. Les chevaux, qui n’étaient pas habitués à l’odeur et à l’aspect des éléphants paniquaient facilement, brisant l’efficacité de la cavalerie. Le seul inconvénient était leur propre tendance à paniquer après plusieurs blessures ou lorsque le cornac (personne qui nourrit et guide l’éléphant) avait été tué, et à faire retraite d’une manière si désorganisée qu’elle pouvait infliger de lourdes pertes à leurs propres troupes. Les Romains, confrontés à ces gigantesques animaux, cherchèrent à les paniquer avec des porcs incendiaires couverts d’une substance enflammée, ou les criblèrent de traits, non mortels mais suffisants pour affoler l’animal.

Un peu d’humour…

humour

Le vinaigre combat la roche

Dans sa traversée des Alpes, Hannibal n’était pas encore au bout de ses peines ; en voici la preuve…

On mit les soldats à l’œuvre pour aménager la paroi rocheuse, la seule voie possible. Comme il fallait entamer la pierre, après avoir abattu et ébranché des arbres gigantesques tout alentour, ils constituaient un énorme amoncellement de branches et comme, en outre, s’était levé un vent violent qui facilitait l’embrasement, ils y mettent le feu et dissolvent la roche brûlante en y versant du vinaigre. La roche une fois ainsi calcinée par l’incendie, ils l’entaillent à coups de pics et atténuent la pente en y aménageant des lacets d’inclinaison réduite, de façon à pouvoir faire descendre non seulement des bêtes de somme, mais aussi les éléphants.

Quels sont les éléments naturels qui font obstacle à la progression d’Hannibal ?

Selon les historiens, l’armée carthaginoise comptait 50 000 fantassins, 9000 cavaliers et 37 éléphants au moment de franchir les Alpes en 218 avant J.-C. Elle accomplit un exploit surhumain devenu légendaire, mais subit des pertes considérables : à l’arrivée en Italie, près de la moitié des hommes sont morts et il ne reste que 27 éléphants.

Quand ses soldats perdent courage, Hannibal leur tient ce discours :

C’est maintenant, quand ils comprennent qu’ils ont largement parcouru la plus grande partie du chemin, franchi les Pyrénées au milieu des peuplades très farouches, traversé le Rhône, fleuve immense, repoussé tant de gaulois par milliers, dompté même la violence du fleuve lui-même, qu’ils ont en vue les Alpes, dont l’autre côté est en Italie, c’est maintenant qu’ils s’arrêtent, épuisés, aux portes mêmes des ennemis ! Que sont les Alpes, à leur avis, si ce n’est de hautes montagnes ? Il n’y a pas de terres, c’est certain, qui touchent le ciel et qui soient infranchissables à l’être humain.

Tite-Live, Histoire romaine
  1.  Quels dangers ont dû affronter les soldats ?
  2.  Comment Hannibal cherche-t-il à convaincre ses soldats de poursuivre la route ?
  3.  S’adresse-t-il à leur raison ou à leurs sentiments ?

Les troupes, poussées par leur général, se remettent en route. Néanmoins la progression reste très difficile…

On vit alors les hommes se débattre dans d’effroyables difficultés : le verglas n’offrant aucune prise au pied et le faisant glisser d’autant plus vite que le terrain était en pente, s’ils s’aidaient, en essayant de se relever, avec leurs mains ou leurs genoux, les points d’appui eux-mêmes se dérobaient, et ils s’écroulaient à nouveau. Il arrivait aussi que les bêtes de somme, au fur et à mesure qu’elles avançaient, entament la couche de neige la plus profonde. Quand elles glissaient, elles la brisaient en profondeur à force de l’entailler à coups répétés de leurs sabots qui cherchaient à s’agripper plus profondément : la plupart, comme si elles avaient des entraves aux pieds, demeuraient clouées dans la glace, durcie en profondeur…

Tite-Live, Histoire romaine

Quelle nouvelle difficulté les troupes carthaginoises rencontrent-elles pendant la traversée des Alpes ?

Un peu de vocabulaire

La neige est l’un des principaux obstacles naturels rencontrés par Hannibal et ses troupes. Un seul éléphant survivra à l’hiver rigoureux après être arrivé en Italie. En latin, la neige se dit nix, nivis, f.

Trouve les expressions ou les mots français formés avec le mot neige qui correspondent aux définitions suivantes.

  •  être parfaitement innocent
  • produit chimique permettant de lutter contre les incendies
  • une affaire qui s’amplifie progressivement
  • fondre très rapidement
  • petite fleur qui pousse à travers la neige
  • personnage fabriqué et habillé par les enfants l’hiver

Hannibal ad portas !

Arrivé en Italie, Hannibal écrase en quelques mois les légions romaines lors de quatre batailles : sur le Tessin, la Trébie, le Trasimène et à Cannes. À Rome, la nouvelle –Hannibal ad portas ! – répand une terreur égale au tumulte gaulois. Mais le chef carthaginois n’exploite pas sa victoire : il reste plusieurs années dans la Sud de l’Italie sans chercher à entrer dans Rome. Quand il revient enfin en Afrique, il est battu à Zama par Scipion qui reçoit le surnom d’Africain.

Complète cette carte en indiquant le parcours d’Hannibal, ses victoires et ses défaites. N’oublie pas de faire une légende (tu peux imprimer et coller la carte sur ton cahier ou le faire sur ta tablette à l’aide d’une capture d’écran).

carte

Recopie ce bilan sur la deuxième guerre punique

  • Malgré la défaite d’Hamilcar, Carthage possède encore des positions solides en Afrique et en Espagne. À 18 ans, en 219 avant J.-C., le fils d’Hamilcar, Hannibal, réunit une armée qu’il conduit jusqu’en Italie en passant par l’Espagne et en faisant franchir le Rhône et les Alpes à ses éléphants.
  • En 218 avant J.-C., enfin, il met les Romains en déroute à Cannes mais il commet l’erreur de ne pas prendre Rome. Une armée de renfort, conduite par son frère Hasdrubal, franchit à son tour les Alpes, mais les Romains la mettent en déroute après la bataille de Métaure (207 avant J.-C.). Dès lors, Hannibal est isolé, avec son armée, dans le sud de l’Italie. Et en 203 avant J.-C., il doit regagner l’Afrique.
  • Publius Cornelius Scipio renverse le cours de la seconde guerre punique en portant l’offensive en Afrique. Il triomphe d’Hannibal à Zama en 202 avant J.-C. et reçoit le cognomen (surnom) d’Africanus.

5ème partie : La troisième guerre punique et la fin de Carthage

Recopie ce résumé de la troisième guerre punique

  • Carthage doit abandonner toutes ses possessions hors d’Afrique, livrer à Rome sa flotte et ses éléphants et payer chaque année un lourd tribut. Mais on se méfie encore d’elle : Caton l’Ancien, en 153 avant J.-C., lors d’une mission à Carthage, constate un inquiétant redressement de la cité punique. Dès lors, il ponctue tous ses discours au sénat par le fameux « Carthago delenda est ! » (« Il faut détruire Carthage ! »).
  • La troisième guerre punique permet de réaliser ce souhait : la ville est rasée et son territoire maudit en 146 avant J.-C. Et Rome s’est accrue d’une nouvelle province : Africa.